Va où toi seul peux aller
Il y a 10 jours, je lançai le premier bœuf du Club Contreforme, soit 24 heures d’improvisation sur le thème « Repli & nouvel élan ». J’écrivais à ce sujet :
Que vous le preniez dans le sens d’un repli sur soi ou d’un repli stratégique et militaire (ou même du repli d’une étoffe), suivi d’une tentative, peut-être infructueuse, de rebond, les possibilités d’interprétation sont multiples.
Je ne croyais pas si bien dire. Les textes produits m’ont enthousiasmé par leur diversité, explorant des sujets qui allaient de l’intime (le repli dans la dépression et peut-être le suicide) au cosmique (l’effondrement d’une étoile sur elle-même), de l’élan d’un athlète sautant à la perche pour mieux échapper à ses doutes, à l’actuel repli d’une humanité confinée dans l’attente du monde d’après. Le thème est une contrainte, un point de départ, une gentille tape dans le dos qui vous pousse dans le grand bain, à vous ensuite d’improviser une nage. Qui sait où elle vous mènera ? Il n’y a pas de mauvaise réponse (même celle à la limite du hors-sujet) et j’étais heureux de constater que la dérive à l’œuvre dans toute improvisation a pleinement joué lors de ce premier bœuf. Chacun a suivi les courants de son imagination et abordé un point du rivage qui lui était propre.
J’envisage ces séances d’improvisation comme des tangentes faisant affleurer des matériaux enfouis. Ils étaient là depuis toujours, mais on préférait ne pas regarder. En ce sens, plus le thème du bœuf vous déstabilise, mieux c’est. De cette perte d’équilibre vous apprendrez quelque chose – ou le faux pas comme stratégie d’introspection.
Une possible ligne de conduite pour l’écrivain serait : Va où toi seul peux aller. Et il n’y a pas d’autre manière de traverser que de bricoler des outils de fortune tout en traversant. Les méthodes ne sont d’aucun secours : ces rationalisations a posteriori ignorent le caractère aléatoire et désordonné de l’imagination.
Le prochain bœuf commencera le vendredi 14 mai à 19 h. Les membres du Club recevront par email le thème et un rappel des consignes. Adhérez dès maintenant pour pouvoir y participer, ainsi qu’au salon du jeudi 6 mai, où nous discuterons à partir de 21 h du Joueur de Dostoïevski (trad. André Markowicz, coll. « Babel », Actes Sud).