Où j’ouvre mon crâne pour fuir le temps
J’ai inauguré en février une nouvelle série de vidéos YouTube intitulée « Studio », où j’ouvre mon crâne pour vous montrer comment fonctionne l’imagination d’un écrivain. Déjà deux vidéos, bientôt trois :
La première est consacrée à ce que j’appelle le temps-espace, ou le temps spatialisé, délinéarisé par la mémoire. Dans « Sous le signe de Saturne », son essai sur Walter Benjamin, Susan Sontag constate et peut-être déplore que le « temps ne laisse pas beaucoup de dérive : il nous pousse d’arrière en avant, nous précipite à travers le chenal étroit du présent vers le futur ». Elle rappelait juste avant le rôle de la mémoire comme « mise en scène du passé », qui « transforme le flot des événements en tableaux ». Les souvenirs et l’imagination, la seconde n’étant qu’une recombinaison des premiers, nous offrent une échappatoire, une dérive hors du temps, de quoi élargir le chenal du présent, le densifier par la pensée. Avec Proust, l’élargissement du chenal est maximal, le temps est comme suspendu, enrichi, retrouvé (cf. ma lettre du 5 octobre 2021, « Flâner dans le temps, mécanismes & processus »).